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narque, s’approcha de moi, et me parla sur-le-champ une langue européenne ; je dis en italien à cet interprète, que je n’entendais point la langue dont il se servait ; il me répondit aussitôt en bon toscan, et nous nous liames. Cet homme était portugais ; il se nommait Sarmiento, pris, comme je venais de l’être, il y avait environ vingt ans. Il s’était attaché à cette cour, depuis cet intervalle, et n’avait plus pensé à l’Europe. J’appris par son moyen, mon histoire à Ben Mâacoro ; (c’était le nom du prince.) Il avait paru en desirer toutes les circonstances ; je ne lui en déguisai aucunes. Il rit à gorge déployée, quand on lui dit que j’affrontais tant de périls pour une femme. En voilà deux mille dans ce palais, dit-il, qui ne me feraient seulement pas bouger de ma place. Vous êtes fous, continua-t-il, vous autres Européens, d’idolâtrer ce sexe ; une femme est faite pour qu’on en jouisse, et non pour qu’on l’adore ; c’est offenser les Dieux de son pays, que de rendre à de simples créa-