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avaient eu beau se tourner de toutes parts, rien d’intéressant ne les avait fixés… Elle a trop d’avance, me disais-je, il y a long-tems qu’elle est arrivée… Ô ciel ! elle est déjà dans les bras d’un monstre que je redoute… je ne parviendrai jamais à l’en arracher.

Le Comte de Fierval était pour lors Ambassadeur de notre Cour à la Porte ; je n’avais aucune liaison avec lui ; en eussé-je eu d’ailleurs, aurai-je osé me découvrir ? C’était pourtant le seul être que je pusse implorer dans mes malheurs, le seul dont je pusse tirer quelqu’éclaircissement : je fus le trouver, et lui laissant voir ma douleur, ne lui cachant aucune circonstance de mon aventure, ne lui déguisant que mon nom et celui de ma femme, je le conjurai d’avoir quelque pitié de mes maux, et de vouloir bien m’être utile, ou par ses actions, ou par ses conseils.

Le Comte m’écouta avec toute l’honnêteté, avec tout l’intérêt que je devais attendre d’un homme de ce caractère… Votre situation est affreuse, me dit-il ; si vous étiez