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amené, et la récompensai sur le serment qu’elle me fit que je n’aurais jamais rien à craindre de son indiscrétion.

La felouque se trouva prête le lendemain au matin, et vous jugez si c’est avec joie que je m’éloignai de ces perfides bords. J’avais 15 hommes d’équipage, le vent était bon ; le surlendemain, de bonne heure, nous aperçûmes la pointe de la fameuse citadelle de Corfou, fière rivale de Gibraltar, et peut-être aussi imprenable que cette célèbre clef de l’Europe[1] ; le cinquième jour nous doublâmes le Cap de Morée, nous entrâmes dans l’Archipel, et le septième au soir, nous touchâmes Pera.

Aucun bâtiment, excepté quelques barques de pêcheurs de Dalmatie, ne s’était offert à nous durant la traversée ; nos yeux

  1. Après les Athéniens, il n’y avait point en Grèce de forces maritimes égales à celles de l’isle de Corcire, aujourd’hui Corfou, aux Vénitiens. Homère, dans son Odissée, donne une grande idée des richesses et de la puissance de cette isle.