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vers les trois heures après-midi, j’entendis frapper au-dessus de ma tête en un endroit de la voûte qui me parut plus faible que le comble, et qui l’était suffisamment pour laisser pénétrer la voix.

J’écoutai : on refrappa. — Pouvez-vous m’entendre ? me dit une voix de femme en mauvais français. — Au mieux, répondis-je ; que desirez-vous d’un malheureux compagnon d’infortune ? — Le plaindre et me consoler avec lui, me répondit-on ; je suis prisonnière et innocente comme vous : depuis 8 jours je vous écoute, et crois deviner vos projets. — Je n’en ai aucun, répondis-je, craignant que ce ne fût ici quelque piège, et connaissant cette ruse basse et vile qui place à côté d’un malheureux un espion deguisé sous la même chaîne, dont le but est d’entrouvrir le cœur de son infortuné camarade, afin d’en arracher un secret qu’il trahit dans le même instant ; artifice exécrable, prouvant bien plutôt l’affreux desir de trouver des criminels, que l’envie honnête et légitime de ne supposer que