Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 2, 1795.djvu/383

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ne m’avouerez-vous pas que cette disproportion, que cette cruelle indulgence de la loi sur certains objets, et sa farouche sévérité sur d’autres, rendent bien douteuse la justice des cas sur lesquels elles prononcent, et sa nécessité bien incertaine.

L’homme déjà si malheureux par lui-même, déjà si accablé de tous les maux que lui préparent sa faiblesse et sa sensibilité, ne mérite-t-il pas un peu d’indulgence de ses semblables ? Ne mérite-t-il pas que ceux-ci ne le surchargent point encore du joug de tant de liens ridicules, presque tous inutiles, et contraires à la nature. Il me semble qu’avant d’interdire à l’homme ce que l’on qualifie gratuitement de crimes, il faudrait bien examiner avant, si cette chose, telle qu’elle soit, ne peut pas s’accorder avec les règles nécessaires au véritable maintien de la société : car s’il est démontré que cette chose n’y fait pas de mal, ou que ce mal est presqu’insensible, la société plus nombreuse, ayant plus de force que l’homme seul, et pouvant mieux