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inventeurs de cette abominable institution, l’espoir de corriger ; mais qu’il faut peu connaître l’homme pour imaginer que jamais la prison puisse produire cet effet sur lui : ce n’est pas en isolant un malfaiteur qu’on le corrige, c’est en le livrant à la société qu’il a outragé, c’est d’elle qu’il doit recevoir journellement sa punition, et ce n’est qu’à cette seule école qu’il peut redevenir meilleur ; réduit à une solitude fatale, à une végétation dangereuse, à un abandon funeste, ses vices germent, son sang bouillonne, sa tête fermente ; l’impossibilité de satisfaire ses desirs en fortifie la cause criminelle, et il ne sort de là que plus fourbe et plus dangereux : ce sont aux bêtes féroces que sont destinés les guichetiers et les chaînes ; l’image du Dieu qui a créé l’univers n’est pas faite pour une telle abjection. Dès qu’un citoyen fait une faute, n’ayez jamais qu’un objet ; si vous voulez être juste, que sa punition soit utile à lui ou aux autres ; toute punition qui s’écarte de là n’est plus qu’une infamie ;