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tante, se trouva à côté de moi, sans me reconnaître ; déjeuna avec plusieurs autres de ses compagnes, sans se douter de rien, et ne revint enfin de son erreur, que lorsqu’après le repas, ma tante l’ayant retenue la dernière, lui dit, en riant, et me présentant à elle : — Voilà une parente, ma belle cousine, avec laquelle je veux vous faire faire connaissance : examinez-la bien, je vous prie, et dites-moi s’il est vrai, comme elle le prétend, que vous vous êtes déjà vues ailleurs… Léonore me fixe, elle se trouble ; je me jette à ses pieds, j’exige mon pardon, et nous nous livrons un instant au doux plaisir d’être sûrs de passer au moins quelques jours ensemble.

Ma tante crut d’abord devoir être un peu plus sévère ; elle refusa de nous laisser seuls ; mais je la cajolai si bien, je lui dis un si grand nombre de ces choses douces, qui plaisent tant aux femmes, et sur-tout aux religieuses, qu’elle m’accorda bientôt de pouvoir entretenir tête-à-tête le divin objet de mon cœur.