Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 2, 1795.djvu/21

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

remontrances ; on mit tout en usage pour me persuader ; mais voyant ma résistance inébranlable, mon père m’embrassa, et nous nous séparâmes.

Je m’éloignai sans doute ; mais il s’en fallait bien que ce fût pour obéir à mon père. Sachant qu’il avait placé chez un banquier, à Paris, une somme très-considérable, destinée à l’établissement qu’il projettait pour moi, je ne crus pas faire un vol en m’emparant d’avance des fonds qui devaient m’appartenir, et muni d’une prétendue lettre de lui, forgée par ma coupable adresse, je me transportai à Paris chez le banquier, je reçus les fonds qui montaient à cent mille écus, m’habillai promptement en femme, pris avec moi une soubrette adroite, et repartis sur-le-champ pour me rendre dans la Ville et dans le Couvent où m’attendait la tante chérie qui voulait bien favoriser mon amour. Le coup que je venais de faire était trop sérieux pour que je m’avisasse de lui en faire part ; je ne lui montrai que le simple désir de