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Celui qui souffre était criminel. — Non, puisqu’il agissait d’après les usages de son pays ; mais le fût-il, qu’importe, son crime le rendait heureux ; en t’y opposant, tu fais un infortuné. — Il est juste que le coupable souffre. — Ce qui est juste, c’est qu’il n’y ait dans l’état de souffrance que l’être faible, créé par la nature pour végéter dans l’asservissement, et tu déranges cet ordre en prêtant ton secours à cet être faible, contre le maître qui a tout droit sur lui ; aveuglé par une fausse pitié, dont les mouvemens sont trompeurs et les principes égoïstes, tu troubles et pervertis les vues de la nature ; mais allons plus loin : supposons les deux êtres égaux, je n’en soutiens pas moins que si dans l’action à laquelle se livre l’homme que tu appelles humain, il faut nécessairement que des deux que cette action touche, il y en ait un de malheureux ; l’action n’est plus vertueuse, elle est indifférente ; car une bonne action qui n’est qu’aux dépens du bonheur d’un homme, une bonne action d’où résulte