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pour leur chef, que le plus féroce d’entre eux. Pendant neuf jours entiers, ils font des exploits dans ce genre, soit sur des prisonniers de guerre, soit sur des criminels, soit sur eux-mêmes, en se battant corps-à-corps, à outrance, et celui qui a fait paraître le plus de valeur ou d’atrocité, regardé dès-lors comme le plus grand de la nation, est choisi pour la commander ; on le porte en triomphe dans son palais, où de nouveaux excès succèdent à l’élection, pendant neuf autres jours. Là, l’intempérance et la débauche se poussent quelquefois si loin, que le nouveau roi lui-même y succombe, et la

    siste la bravoure ? à étouffer les sentimens naturels, qui nous portent à notre conservation ; dans la férocité, il s’agit de la conservation des autres ; mais le mouvement est toujours d’étouffer la loi naturelle, on a donc eu tort de dire, qu’un homme féroce n’était jamais brave ; le courage, à le bien prendre, n’est qu’une sorte de férocité, et ne peut être compris, philosophiquement parlant, que dans la classe des vices ; nos seuls préjugés en font une vertu ; mais nos préjugés sont toujours bien loin de la nature.