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privations… Si tu n’étais pas si scrupuleux, je t’en offrirais… Comme de ceci, dit-il en montrant la dégoûtante chair dont il se repaissait… Mais tu refuserais tout de même. — Cesse d’en douter, vieux pécheur, et convaincs-toi bien que j’aimerais mieux déserter ton infâme pays, au risque d’être mangé par ceux qui l’habitent, que d’y rester une minute au dépens de la corruption de mes mœurs. — Ne comprends pas dans la corruption morale l’usage de manger de la chair humaine. Il est aussi simple de se nourrir d’un homme que d’un bœuf[1]

  1. L’antropophagie n’est certainement pas un crime ; elle peut en occasionner, sans doute, mais elle est indifférente par elle-même. Il est impossible de découvrir quelle en a été la première cause : MM. Meunier, Paw et Cook ont beaucoup écrit sur cette matière sans réussir à la résoudre ; le second paraît être celui qui l’a le mieux analysée dans ses recherches sur les Américains, tome I, et cependant, quand on en a lu et relu ce passage, on ne se trouve pas plus instruit qu’on ne l’était auparavant. Ce qu’il y a de sûr, c’est que cette coutume a été générale sur notre