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pagnie allait être donnée, et malgré tout cela il m’exhortait vivement à ne pas sortir de mon asyle. Enfin ce dernier malheur arriva, j’écrivis pour le prévenir, je prétextai un voyage indispensable chez l’étranger, une succession essentielle à recueillir, toutes mes ressources furent vaines, et le ministre nomma à mon emploi.

Voilà, ma chère Aline, voilà les cruelles raisons qui motivent le reproche peu mérité que me fait votre père, reproche d’autant plus injuste, qu’il ignore les raisons qui me contraignent à le recevoir. Entre-t-il dans ce malheur quelque chose qui puisse me faire perdre votre estime, ou qui puisse m’aliéner la sienne ? J’ose en douter.

Deux ans d’exil volontaire s’étant écoulés, je crus pouvoir me rapprocher de mes biens, je partis pour le Languedoc ; mais que trouvai-je, hélas ! Des maisons démolies ; des droits usurpés ; des terres incultes ; des fermes sans régisseurs, et par-tout du désordre, de la misère et du délabrement. Deux mille écus