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Valcour à Aline.

que je ne vous visse plus…, Et qui donc a pu l’instruire de nos secrets ? Ah ! peut-on se cacher quand on aime ? S’il a derobé nos regards, il aura surpris notre amour… que ferai-je, hélas ! pendant cette terrible absence… que voulez-vous que je devienne ? au moins si j’avais pu vous voir encore une fois… une seule fois avant cette funeste séparation !… si j’avais pu vous dire combien je vous aime… il me semble que je ne vous l’ai jamais dit… oh non, je ne vous l’ai jamais dit, comme je l’eprouve… et comment aurai-je réussi ? quel mot aurait pu rendre ce feu divin qui me dévore ? Tantôt anéanti par la force même de ce sentiment qui m’absorbe… tantôt brûlé par vos regards… mon âme éprouvait, sans pouvoir peindre ; toutes les expressions me paraissaient trop faibles… et maintenant je me désole, d’avoir tant perdu d’occasions ou de les avoir si mal employées. Comme je vais les déplorer ces momens si courts et si doux ! Aline, Aline, croyez-vous donc que je puisse vivre sans les retrouver ? Et cependant vous pleurerez… votre âme sera noyée dans la douleur, et je n’en pourrai partager les an-