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CORRESPONDANCE INÉDITE DU MARQUIS DE SADE — AN VIII.
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galimatias où il fait précéder sa signature des mots : « Votre cher fils ». « Je ne croyais pas avoir couché avec votre mère, mon cher Charles », lui répond M. de Sade.

Enfin, le dix-neuf frimaire, le département des Bouches-du-Rhône prend un arrêté semblable à celui que le département de Vaucluse a pris dix mois plus tôt. Le séquestre d’Arles est levé.

Mais le marquis est si mal en point qu’il est entré à l’hôpital de Versailles. La charité publique est son seul refuge. Quesnet vit de son travail et a dû se séparer de lui. Il est en proie à la vermine.

Charles est allé à Arles, mais il n’en a rien rapporté, sinon un assez bon arrangement avec le receveur pour le paiement des impôts arriérés. L’ancien et le nouveau fermier, qui doivent, à eux deux, six mille cent livres, ne lui ont pas donné un sou. Il n’a même pas pris le temps de les voir. Il a eu froid en cours de route et s’est hâté de revenir. Le marquis persifle durement « le petit abbé ». Il est aussi poule mouillée que son père.

L’avocat et son fils ont pressé les fermiers, mais ceux-ci se plaignent de n’avoir point joui, car les bâtiments sont en ruine et les terres à l’abandon, et ils se disent hors d’état de payer tout de suite. Le marquis n’entend point cela. Il est depuis cinquante-sept jours à l’hôpital, pour dix sous par jour qu’il ne peut même pas trouver, et on va le renvoyer. Gaufridy père et fils s’accordent pour le tromper. Leurs promesses ne se réalisent jamais et l’argent fond en passant par leurs mains avant d’arriver dans sa poche. Ses amis ont raison de lui dire qu’ils se f… de lui ! M. de Sade va partir (quelqu’un lui prêtera quinze louis pour faire ce voyage) et on verra.

Cette menace n’avance point les choses : Gaufridy n’a rien touché et les fermiers ne paient pas davantage.

Le marquis ne se connaît plus. L’argent est chez l’avocat qui le fait valoir à son profit, mais on saura lui desserrer les doigts.

Cependant les imprécations de M. de Sade s’accompagnent d’un surcroît d’exigences et d’une sorte de mise en demeure de trouver sans délai un fermier qui paiera six mille livres pour le mas de Cabanes, qui n’exigera aucune réparation et qui ajoutera à ses redevances un pot de vin de deux mille livres pour Quesnet et un cheval pour l’avocat. Au milieu de sa grande colère, le marquis se souvient de l’offre que Lombard a faite à Gaufridy et que celui-ci a repoussée. Du reste il est trop tard : M. de Sade va être emprisonné pour dettes.