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CORRESPONDANCE INÉDITE DU


sur cela. On gémit et l’on se tait[1]. Savez-vous que ce pauvre Dolci, mon ami intime et le fils du gentilhomme du vice-légat d’Avignon, y a passé. On l’a enterré avec dix-huit cents autres dans le jardin de la maison où j’étais en détention. Je suis fâché des démarches que vous avez fait faire près de Goupilleau par d’autres que par moi. J’espère au moins que vous serez bien convaincu que les miennes seules ont réussi et je serais bien fâché que vous eussiez dû cela à d’autres qu’à moi. Réponse tout de suite, je vous en prie ; je ne crois plus nécessaire de me servir d’adresses détournées. Vous devez être libre maintenant et je n’aime pas ce qui sent encore la prison. Je vous embrasse de toute mon âme.


Le marquis a fait traite sur l’amitié de l’avocat et non sur sa bourse. (22 nivôse).

Je suis enchanté, mon cher citoyen, que vous ayez enfin reçu ce que je désirais tant que vous receviez. Vous avez dû voir que je n’y ai pas perdu de temps et c’est tout ce que je voulais. La citoyenne Quesnet a été très sensible à votre lettre ; elle me charge de vous le témoigner et de vous dire qu’elle se réunira toujours à moi quand il s’agira de vous être bon à quelque chose……

Tranquillisez-vous sur les frais que vous supposez que j’ai faits et ne me parlez jamais de cela, et parce que je n’en ai fait aucun, et parce qu’en eussè-je fait, ce n’est qu’à votre amitié seule et non à votre bourse qu’il conviendrait de l’acquitter ; mais je n’en ai point fait, ainsi dormez en paix……


Le marquis se plaint du froid qu’il fait, de l’état de sa santé, ébranlée par la vue de la guillotine, et de celui, plus fâcheux encore, de sa bourse. Le vieux président de Montreuil est mort. (2 pluviôse, an III).

J’ai reçu du mieux qu’il m’a été possible, mon cher citoyen, les deux aimables amis qui vinrent avant-hier, trente nivôse, m’apporter votre lettre du dix. Ils avaient affaire chez le député Rovère, où je n’ai pu les mener, ne le connaissant point du tout[2]. Je leur ai offert de les mener chez

  1. Je m’en voudrais de ne pas rapprocher de ce qui précède le passage suivant d’un billet sans date du marquis :
       « Mon opinion sur les citoyennes d’Autric ».
     ……Si l’une de ces demoiselles avait « huit mille livres de rente » et qu’elle voulût de moi, je l’épouserais sur le champ. Mais il faut huit mille livres de rente pour épouser une femme, parce que, divorçant, je dois en payer quatre à madame de Sade et qu’il m’en faut bien quatre pour loger, nourrir et entretenir une nouvelle femme. Si vous répondez à cette plaisanterie, parlez de moi comme d’un autre et dites : « L’homme qui propose d’épouser une d’Autric, etc., etc. ».
  2. Ceci dément l’assertion, souvent imprimée, que le marquis aurait dû sa mise en liberté à Rovère.