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CORRESPONDANCE INÉDITE DU


sans une maîtresse italienne et je l’assure (et vous aussi) que c’est un moyen dont je ne me servirai sûrement pas. Mandez-moi bien des nouvelles, bien des détails, écrivez toujours bien gros et aimez-moi toujours un peu car je vous suis et vous serai toute ma vie bien sincèrement attaché……

Recommandez toujours exactement à votre ami d’Aix d’affranchir les lettres qu’il me fait passer. Envoyez-moi je vous prie au plus vite le nom de la fille de M. de Donis mariée à Mazan. Croiriez-vous que j’ai fait la bêtise de l’oublier, ce qui a paru assez singulier ici. Mais telle est ma pauvre tête ; j’oublierai bientôt mon propre nom je crois… Madame de Valette, le voilà qui me revient en cachetant ma lettre !


Le marquis est fatigué de la route qu’il a faite et attend un envoi de mille écus. (Sans date).

Madame de Sade a dû sûrement vous dire, mon cher avocat, combien je la presse de m’envoyer mille écus. Je vous demande instamment de tout tenter pour me les faire passer au plus tôt. Par cet arrangement je laisse tout le monde tranquille jusqu’à Pâques et ne reparais plus qu’à cette époque. Mais vous sentez combien il est nécessaire d’avoir mon argent d’avance pour savoir (d’avance aussi) si je peux continuer ma route. Au nom de Dieu, mettez tout en usage pour me faire cette somme et me l’envoyez au plus tôt ! Ne parlez à personne de mon retour ; laissez croire que je ne reparaîtrai pas de fort longtemps et que vous savez positivement que, même mon affaire finie, je ne veux revenir de deux ou trois ans. Cette idée est extrêmement essentielle à répandre…… Nous sommes arrivés aux deux tiers de notre route (dont je vous écris) en assez bonne santé, mais bien fatigués, les chevaux et les hommes rendus et abîmés des montagnes terribles et des excessives chaleurs ; je n’en ai de ma vie ressenti d’aussi fortes. De grâce, démêlez la fusée et tâchez de savoir de qui est l’esclandre dernière ; j’en suis bien inquiet.

Quelques détails aussi sur la route et l’arrivée de Nanon à Arles. Je vous embrasse de tout mon cœur.


M. de Sade sera obligé de repasser les monts s’il ne reçoit pas ses mille écus. (Sans date : Août 1775).

Mon cher avocat, vous êtes un homme charmant, mais vous vous occupez peu de me trouver les mille écus dont j’ai besoin et cependant vous m’exposez aux désagréments et aux inconvénients les plus grands si vous ne me les faites passer avant la fin d’août ; alors ou il faut que je reste ici, où l’air est mortel aux étrangers, ou il faut que je repasse les monts dans la plus mauvaise saison et que je risque de me tuer. Pardonnez-le moi, je ne suis pas sujet aux reproches, et surtout avec vous que j’aime de tout mon cœur, mais vous avez le défaut de tous les gens qui n’ont pas voyagé. C’est de ne jamais se mettre à la place des autres et d’imaginer qu’on est partout