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SASCHA ET SASCHKA.

Sa sœur, veuve du comte Rutboski, alla voir dame Zagoinska, s’éprit de Marga, et se mit en tête de la marier avec son frère. Quand cette charmante et capricieuse jeune femme se coiffait d’une idée, ce n’était pas en vain. Elle était habituée à voir tout le monde se plier à ses fantaisies ; elle ne souffrait pas plus la contradiction qu’une sultane accoutumée à être servie par des esclaves.

Peu de temps avant Pâques, un tailleur juif se rendit à l’improviste dans la maison Zagoinski, où, à l’aide de quelques bouts de papier qu’il tira de la poche de son cafetan bleu, il prit la mesure de Marga. Sa mère lui parla d’une agréable surprise qui lui était réservée, mais elle garda sur le reste un silence mystérieux.

La jeune fille se mit en vain l’esprit à la torture pour deviner les projets de sa mère. On juge de sa surprise quand, la veille du jour de Pâques, dame Zagoinska l’appela dans sa chambre, où elle lui fit cadeau, en présence de la comtesse Rutboska, d’une robe de soie rose. Marga rougit à plusieurs reprises, d’abord de la joie que lui causait ce joli présent, puis en entendant la comtesse s’écrier :

« Qu’elle est ravissante, cette petite ! » tandis que la jeune fille, vêtue de sa charmante toilette, se plaçait devant la grande glace de l’appartement ; puis enfin en se demandant ce que Saschka dirait s’il la voyait ainsi parée.

« Demain tu auras la même toilette », dit la mère.

Le dimanche de Pâques, les parents, les amis, les