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SASCHA ET SASCHKA.

— C’est à n’y pas croire, dans cette maison, à côté d’un homme imbu des principes élevés d’une saine philosophie ! »

Le curé, profondément étonné, s’était placé en face de Zagoinski, et, tandis qu’il tournait le dos à Marga, il cherchait à rencontrer la main de celle-ci sous la table.

« Il est donc vrai que les extrêmes s’attirent.

— En effet, car ma femme commence à se familiariser avec Voltaire, fit observer Zagoinski.

— C’est parfait ! »

Sascha était parvenu enfin à saisir la lettre, mais il s’agissait maintenant de la glisser dans sa poche.

« Mais, tout en rendant d’abord hommage à cet homme éclairé, poursuivit Zagoinski, nous ne devons point méconnaître les lumières qu’ont répandues les autres grands philosophes. Il est nécessaire de connaître Rousseau. »

Le curé fit un signe de tête et fit passer adroitement la lettre de Marga de sa main gauche dans la droite.

« Puis Montesquieu, Diderot et aussi l’abbé Prévost.

— Je n’ai rien lu de ce dernier, qu’a-t-il donc écrit ?

— Oh ! il faut que vous lisiez sa Manon Lescaut : c’est un tableau saisissant des erreurs et des passions humaines.

— J’en écrirai le titre. »

Le curé tâchait de glisser la lettre dans sa poche.

« Permettez que je vous l’écrive moi-même, s’écria Zagoinski en saisissant la lettre par une extrémité,