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SASCHA ET SASCHKA.

Qu’est-il arrivé ? un malheur ?…

— Pas bien grand, ne vous effrayez point, dit Marga avec un douloureux sourire, je me suis seulement fait un peu mal au pied. Je vous prie, allez chercher des gens qui me ramènent à la maison.

— Ce serait trop long, répondit Saschka, la nuit vous surprendrait dans la forêt. Je vais vous prendre dans mes bras et vous porter au château. Ce sera plus simple. »

La jeune fille rougit.

« Que vous êtes bon, dit-elle, mais je ne puis vraiment accepter.

— Je serai heureux de pouvoir vous rendre service.

— Eh bien, j’y consens : à la grâce de Dieu ! »

Saschka plaça son fusil en bandoulière et prit avec précaution la jolie châtelaine, qui passa ses bras autour du cou du jeune homme ; puis il se mit en route à pas mesurés, la portant comme un enfant à travers la forêt avec un tendre respect.

Arrivé sur la lisière du bois, il s’arrêta, déposa Marga sur un tronc d’arbre coupé et s’étendit lui-même à ses pieds sur le gazon.

« Combien je suis fâchée de la peine que je vous donne ! Je dois être très lourde », dit la jeune fille.

Puis elle se mit à rire en regardant Saschka.

« Quel roi ne voudrait être à ma place ? répondit celui-ci.

— Point de compliments, je vous prie.

— Faut-il vous dire que je vous suis dévoué corps et âme !

— Je le crois, je l’espère, balbutia Marga. — Mais