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SASCHA ET SASCHKA.

— Il serait difficile de vous en vouloir.

— Vous me rendez confuse. Au revoir.

— Vous êtes trop aimable, mademoiselle. Bonne nuit. »

Quelques jours après, Saschka, muni de ses livres, vint au château. Marga rougit quand il la pria de vouloir bien les accepter comme témoignage de son respect ; elle les ouvrit, puis, regardant l’intérieur avec embarras :

« Mais comment pourrai-je jamais lire cela ? s’écria-t-elle tout à coup en riant ; qu’est-ce que ces hiéroglyphes ?

— Ce sont nos caractères cyrilliques.

— Vous m’apprendrez à les connaître, n’est-ce pas ?

— Je suis à votre service. »

Saschka se rendit dès lors plus souvent au château, et, aussitôt qu’une occasion favorable se présentait, quand M. et Mme Zagoinski jouaient aux dominos, que Vanda improvisait au piano et que Karol était à la chasse, le jeune homme allait s’asseoir sous la véranda avec Marga ; celle-ci suivait du doigt sur son livre des lettres étranges et mystérieuses qu’elle épelait difficilement. Les signes par lesquels ils se communiquaient les impressions de leurs cœurs bons et purs eussent été tout aussi énigmatiques pour d’autres que l’étaient pour Marga les caractères cyrilliques. Un regard, un sourire, un soupir, une légère pression de main leur suffisait.

Karol allait rarement chez Sascha, aussi y avait-il grande agitation à la cure quand un nuage de poussière s’élevait dans la rue, et qu’au milieu de ce nuage