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SASCHA ET SASCHKA.

sur des thèmes scientifiques, faisaient des rapports, se battaient au sabre et au fleuret, chantaient des chœurs d’étudiants allemands et portaient, cachés sous la chemise, des rubans aux couleurs nationales.

De cette association secrète sortirent peu à peu ces tentatives innocentes et dignes du respect des habitants de la Petite-Russie, pour le perfectionnement de leur langue maternelle et de l’histoire de leur pays, dont la jeunesse s’occupait depuis quelques dizaines d’années. Le premier fruit qui en résulta fut la recherche des légendes et des chants nationaux dans le pur et vrai genre populaire, en suivant l’exemple des frères Grimm et non en imitant le style orné, autrefois fort en vogue, d’un Perrault ou d’un Musæus. Saschka entreprit cette noble tâche avec une grande ardeur.

Secondé dans ses efforts par ses compagnons, il parvint à posséder deux beaux manuscrits, qu’il présenta, avec grande émotion, à l’examen de l’autorité. Il ne tarda pas à être assigné à comparaître, car c’était tout nouveau, et par cela même évidemment dangereux, que des étudiants s’occupassent de choses semblables. Mais Saschka réussit à prouver au censeur qu’il ne devait point entraver des efforts juvéniles ayant pour but la publication de légendes et de chants qui depuis des siècles passent de bouche en bouche parmi le peuple. L’autorisation de livrer les manuscrits à l’impression fut donc accordée. Pourtant plusieurs mois s’écoulèrent avant qu’ils parussent.

On était en été ; Saschka venait de passer de bril-