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SASCHA ET SASCHKA.

Une première fois sa femme lui adressa une sévère admonestation ; la deuxième et la troisième fois elle lui fit des représentations amicales, puis elle changea entièrement de tactique. Aussitôt que Sascha s’absentait pour une demi-journée, la jeune femme courait au bureau de son mari, elle ouvrait le grand secrétaire, furetait parmi les actes qui s’y trouvaient accumulés, et répondait elle-même aux questions et aux lettres du secrétariat épiscopal en toute science et conscience.

Dès lors on parut être fort content à l’évêché de la cure de Visla, et, un jour qu’une vive polémique s’était engagée entre l’Ordinaire et dame Homutofko au sujet du baptême d’un enfant mort, l’affaire se termina tout à l’avantage de Spiridia.

Quand arriva le moment où Saschka dut aller au collège, son père ne se résigna pas cependant à l’envoyer dans la capitale ; il l’emmena pour le temps de ses études chez un ecclésiastique de ses amis qui demeurait près de Visla, dans le chef-lieu du cercle inférieur de Kolomea. Tous les samedis soir Saschka pouvait retourner à la maison pour passer le dimanche chez ses parents. C’était donc un vrai jour de fête pour la famille.

Sascha se rendait chaque semaine au-devant de son fils. À peine était-il monté en voiture auprès de lui et l’avait-il embrassé, qu’il commençait à le questionner sur ce qu’il avait entendu et appris ; puis, après le souper, le curé et Saschka restaient à table et causaient jusqu’à une heure avancée de la nuit ; le dimanche, dans l’après-midi, ils allaient dans les champs,