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SASCHA ET SASCHKA.

Sascha et Spiridia purent enfin prendre possession de leur maison, qui, il est vrai, n’était guère plus grande que le nid bâti par l’hirondelle sous les toits en saillie, mais du moins elle était bien à eux.

Sascha fut nommé curé dans un village qui se trouvait sur les frontières de la fertile Bukowine, et il s’y rendit avec sa jeune épouse. L’église, construite sur une petite éminence, s’élevait au milieu du pays, et tout près d’elle se trouvait la cure, qui ne différait guère des autres habitations ; une autre maisonnette plus petite encore y attenait : c’est là que se fixa le jeune ménage.

Deux chambres étroites, une cuisine, une salle à manger, une petite écurie, une modeste grange, un carré de gazon planté de quetschiers et un champ composaient tout leur avoir. Non seulement cette propriété était fort simple, mais son entretien avait été négligé outre mesure. Les vitres des fenêtres étaient réparées avec du papier, l’enduit de chaux des murailles était tombé dans maint endroit, et sur le plancher on remarquait de nombreux trous pratiqués par les souris. Plus loin on voyait croître le gazon entre les briques dont la cuisine était pavée. Une moitié de la porte de l’écurie se trouvait enlevée, il pleuvait à torrents dans la grange, et les mauvaises herbes croissaient tout à leur aise dans le champ. Néanmoins, peu de temps après, tout était propre et gai, comme le petit bonnet fraîchement repassé et le tablier blanc de la jeune maîtresse de la maison.

Par un heureux hasard, les beaux jours furent nombreux en automne, et l’hiver arriva plus tard