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SASCHA ET SASCHKA.

non moins d’assiduité qu’auparavant, et sa fiancée employa ses heures de loisir à s’instruire en différentes sciences autant qu’elle le put à l’aide de la bibliothèque de son père et des livres de quelques voisins. Elle s’occupa même d’astronomie, de logique et de dogmatique. Sascha revint aux vacances et il passa deux heureux mois dans le voisinage de la famille Nogaïski, avec laquelle il eut de doux et fréquents rapports.

Les fiancés virent s’écouler ainsi deux années bien longues. Ils attendirent patiemment, et avec une ferme confiance dans l’avenir, le moment où ils devaient être unis pour toute leur vie.

Le jour arriva enfin où Sascha, ayant passé ses derniers examens d’une manière brillante, retourna au pays natal pour introduire dans sa maison, avant de recevoir les ordres, son épouse bien-aimée.

On célébra un vrai mariage de Petite-Russie. Sascha et plusieurs étudiants en théologie plus jeunes que lui allèrent, selon l’antique usage, s’emparer de la fiancée, et, lorsque leur entreprise eut réussi au milieu des rires et des plaisanteries, Sascha et Spiridia furent enfin unis par un lien indissoluble dans la petite église du village, que l’on avait ornée de mousse. À un joyeux banquet succédèrent les danses et les chants, qui ne se terminèrent qu’au grand jour. Ensuite le jeune couple monta dans une voiture conduite par un juif et se rendit à la capitale, pour se consacrer à Dieu, à l’église et au peuple ; car à cette époque, dans la Petite-Russie, le prêtre était tout à la fois instituteur, médecin, avocat et même, quand cela devenait nécessaire, homme d’État et soldat.