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LA MÈRE DE DIEU.

lou conduisait son cheval par la bride. Sofia aussi était à cheval, à côté de Wewa, brandissant un knout. Un jeune géant habillé en paysan portait une grande bannière, où était dessinée l’image de la Vierge.

Wewa s’arrêta devant la porte, et leva les bras au ciel solennellement.

« Où est Sabadil ? s’écria-t-elle d’une voix de tonnerre. Vous le retenez prisonnier sans mandat, contre la loi ? Rendez-nous sur-le-champ Sabadil. Je vous l’ordonne, moi la Mère de Dieu !

— Quelle audace ! cria Barabasch rouge de colère ! sortant brusquement de la foule. Sauve-toi aussi vite que possible, je te le conseille, car c’est aujourd’hui qu’auront lieu le jugement et la punition des impies.

— Un jugement ! cria Wewa avec fureur, oui, un jugement ! Et c’est moi, la Mère de Dieu, qui le rendrai. Je suis venue prononcer l’anathème sur cette fausse prophétesse, cette hypocrite, cette Athalie ! Je le prononce maintenant sur vous, idolâtres, qui offensez l’Éternel, journellement maudits ! Je vous voue à jamais aux flammes de l’enfer.

— Silence, païenne, vociféra Barabasch. Que tes péchés t’étouffent ! »

Il se précipita comme un possédé sur Wewa. Mais les partisans de cette dernière s’élancèrent à son secours, et le jeune géant lui donna un tel coup de poing dans la poitrine, qu’il chancela et alla rouler sans mouvement dans la neige.

Lorsque les Duchobarzen qui remplissaient la cour virent cela, ils poussèrent des cris de rage, et coururent en masse sur les impies. Barabasch se releva, et