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LA MÈRE DE DIEU.

net, il était en train de feuilleter des actes passés devant lui, en fumant un cigare dont l’arôme remplissait toute la chambre. Près de lui travaillait un clerc, qui ne cessait de tousser et de cracher.

« Qui est là ? » demanda Zomiofalski, d’un ton haut et bref.

Pas de réponse.

« Eh bien, qu’y a-t-il ? »

Mardona s’avança, humble et presque craintive. Elle fit deux pas seulement et s’arrêta les yeux baissés.

Zomiofalski tourna la tête, posa son cigare et se leva.

« Que voulez-vous ? Avez-vous reçu une citation ? » dit-il en s’adossant au pupitre.

Mardona fit signe que oui.

« Ah ! précisément ! »

Il feuilleta un acte.

« Ainsi vous êtes la nommée Mardona Ossipowitch, la Mère de Dieu des Duchobarzen ? »

Mardona répondit de nouveau du geste.

« Mais vous êtes une femme terrible,… vous agissez avec une barbarie… comme les Turcs ou les Tartares, continua Zomiofalski. Ignorez-vous qu’il y a des lois ? Toi et les tiens… vous avez lapidé… cette…, comment diable se nomme-t-elle donc ? Vous l’avez lapidée, blessée grièvement. C’est par miracle qu’elle en a réchappé. Qui donc t’a chargée de la juger ? Cela peut avoir des suites fort tristes pour vous, et surtout pour toi. »

Mardona ne répondit pas. Elle écouta les reproches de Zomiofalski sans un mot, digne comme Jésus devant