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LA MÈRE DE DIEU.

Sukalou réfléchit.

« Je mangerais bien quelques œufs, dit-il enfin ; puis, peut-être, du fromage et un morceau de beurre. Quant au gâteau, que tu as sûrement pétri toi-même, de tes jolies mains, — Wewa rougit de plaisir — j’en goûterai un peu plus tard, pour te faire plaisir, puisque tu y tiens. »

Lisinka parut et commença à apprêter les œufs, tandis que Wewa mettait la table et allait chercher tout ce que contenait son garde-manger.

Sukalou examina un instant les assiettes et les pots, et soupira. Puis il prit une pincée de tabac dans sa tabatière, d’un air grave. Enfin il saisit le couteau :

« Je crois que je commencerai par un peu de beurre et de fromage, dit-il nonchalamment, en se taillant une énorme tartine.

— Tu as changé d’avis, à ce qu’il paraît ? demanda Wewa.

— Oui, murmura Sukalou la bouche pleine, en avalant de gros morceaux de fromage.

— Ainsi, tu ne me traites plus de baba ? reprit Wewa avec un sourire.

— À quoi penses-tu ? s’écria Sukalou indigné et hors de lui, et si hors de lui, qu’un morceau de pain faillit l’étrangler ; mais, Wewa, me prends-tu pour un Tartare ? Je t’ai dit cela devant Mardona, tu comprends ? Je voulais lui plaire, à cette femme. Elle a un naturel si jaloux, qu’en sa présence il n’est pas permis de trouver quelqu’un joli. Mon Dieu ! que veux-tu ? elle est curieuse. Toi, Wewa, tu as la taille un peu forte, mais cela prouve que tu es robuste, bonne au