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LA MÈRE DE DIEU.

« Bonsoir », dit enfin Sabadil.

Il tira sa casquette et entra.

« Que le ciel bénisse ton arrivée au milieu de nous ! » répondirent en chœur les assistants. Et ils le regardèrent avec quelque curiosité, mais sans méfiance et d’un air très bienveillant. Quelques-unes des jeunes filles, même, lui sourirent malicieusement ; alors seulement il vit que Mardona était dans la chambre. Derrière la porte qu’il avait tenue entr’ouverte, dans un coin, se trouvait un siège élevé, comme une espèce de trône, où l’on arrivait par des degrés de bois. Mardona y était assise. Elle portait de hautes bottes de maroquin jaune et une jupe et un corsage de soie bleue. Son cou, ses bras et les nattes blondes de ses cheveux étaient parés de gros coraux et de sequins scintillants comme des étoiles. Elle était fort bien ainsi, très calme, et avait la majesté d’une souveraine.

Elle se leva lorsqu’elle aperçut Sabadil, s’avança à sa rencontre avec beaucoup de dignité et le salua d’un air affable. Puis elle lui prit la main et lui donna un baiser. Sabadil rougit, tout confus. Mardona remarqua son trouble et sourit.

« Je suis contente que tu sois venu, lui dit-elle. Assieds-toi là, près des autres. »

Sabadil s’inclina sans parler, et, tandis qu’elle retournait à sa place, il se glissa vers la muraille. Il se sentait tout honteux maintenant, et très intimidé. Il n’osait ni s’asseoir, ni se rapprocher de Mardona, et encore moins lui adresser la parole.

Les assistants ne faisaient plus attention à lui, à l’exception de l’un d’eux cependant, un homme d’une