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SASCHA ET SASCHKA.

riant ; ne vous avais-je pas dit, mademoiselle, que notre Saschka ne se battrait point en duel ? »

Le soir, M. et Mme Zagoinski se rendirent en voiture au presbytère pour aller chercher Marga. Le curé commença d’abord par se justifier.

« Vous avez agi comme un homme, s’écria le lieutenant Silvaschko.

— Dites plutôt comme un père, interrompit Sascha, car cela seul peut expliquer ma conduite.

— Pour le moins, et quoi qu’il advienne, je vous serai éternellement reconnaissante, car j’aime Saschka de toute mon âme, et jamais je ne donnerai ma main à un autre qu’à lui. »

Dame Zagoinska fit bien une mine un peu allongée, mais comme, contrairement à ce qu’elle supposait, son mari accorda son consentement au mariage, il ne lui resta plus qu’à approuver l’union du jeune couple.

Le curé n’eut rien à démêler avec la justice, qui ne s’émut point au sujet de son duel. Il était d’usage de passer sous silence les affaires de ce genre. En revanche, il n’attendit point que son évêque lui envoyât une assignation ; il alla de lui-même le trouver pour confesser ce qu’il appelait son faux pas ; il lui en eût moins coûté d’avoir un second duel.

L’évêque le reçut avec gravité, mais cordialement, comme à l’ordinaire.

« Je viens, cette fois, pour faire l’aveu d’une faute grave, commença le curé d’une voix tremblante et en essuyant son visage.

— Vous ? Mais ce n’est pas possible !

— Pardon, monseigneur.