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SASCHA ET SASCHKA.

donnait au curé, qui l’écoutait avec une attention soutenue, de sages conseils au sujet du duel qui devait avoir lieu.

« Quand on est assez habile pour manier son arme en maître, dit-il entre autres choses, il est bon d’attendre que l’adversaire se soit un peu fatigué à l’attaque, mais ce n’est point là votre cas, car vous ne savez pas tirer ; une défense prolongée vous fatiguerait au point qu’il vous deviendrait impossible de porter un seul coup avec assurance. Il faudra donc l’attaquer vivement : plus vous y mettrez d’ardeur et mieux vous réussirez. Si, dès le début, vous ne parvenez pas à l’intimider et à le blesser, alors ce sera le finis Poloniœ. »

Après le dîner, les deux amis prirent un peu de repos, burent du café noir et fumèrent leur chibouque. Midi sonnait au village quand Silvaschko mit solennellement le sabre dans la main de Sascha. Puis il commença à lui montrer la position qu’il devait prendre, les diverses manières dont il devait porter ou parer les coups, les avances et les reculs ; il lui enseigna ensuite deux coups d’escrime dont il avait lui-même usé plusieurs fois et avec succès ; enfin il en arriva à l’attaque.

« Attaquez ! attaquez ! criait-il sans relâche à Sascha et avec une ardeur infatigable. Plus vivement, parez, couvrez mieux la tête. »

Et chaque coup était suivi d’un bravo :

« Très Révérend, bravo ! Plus de calme. Mais couvrons toujours la tête… »

Chaque fois que le curé, fatigué abaissait son arme,