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LES PRUSSIENS D’AUJOURD’HUI

principes philosophiques, mais bien l’impression produite sur elle par sa personne.

Au coin de la rue des Lys l’inconnue s’arrête.

— Il ne faut pas m’accompagner plus loin, dit-elle de sa jolie voix et d’un ton à couper court à toute supplication.

— Accordez une faveur à un pauvre mortel qui se souviendra toute sa vie de ce quart d’heure. Permettez-moi de vous revoir.

Plant sait très-bien que cette phrase sent l’épistolaire à l’usage des amoureux, et il en est honteux ; mais la belle n’est pas du même avis.

Elle réfléchit et déclare qu’elle lui écrira. Il tire sa carte, y griffonne son adresse au crayon et la lui tend, avec un élégant salut qui lui est plus utile, aux yeux de la jolie fille, que tout le luxe d’esprit qu’il a étalé. Elle lui fait un signe de tête amical et tourne le coin de la rue.

Le lendemain, Plant est dans une agitation indescriptible. Il écrit même une pièce de vers, pour laquelle Heine lui sert légèrement, et, par sa chambrière, une autorité en pareilles choses, il se fait expliquer ses rêves de la nuit, à l’aide d’un petit livre crasseux. D’après cet oracle, la vue d’une jolie voiture annonce une liaison avec des gens de haut parage.

Cette fois, cependant, l’oracle a tout l’air de ne