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LES PRUSSIENS D’AUJOURD’HUI

la tête découverte, plongés dans une profonde méditation, dans leurs souvenirs.

Les larmes roulaient sur les joues du pauvre Andor. Le comte s’en aperçut et lui prit doucement la main.

— La dernière nuit où j’ai veillé votre mère, lui dit-il, je la vis prier avec ferveur. Il devait y avoir dans mon regard quelque chose d’interrogateur ; car elle se tourna vers moi, et me dit de sa douce voix : Je ne prie pas pour moi ; depuis des années, je ne fais qu’une même prière : que « mon fils reste honnête. » Si jamais prière a été exaucée, c’est celle-là ; et comme c’est vous qui avez réalisé le seul souhait ardent de votre mère, cela doit vous consoler, vous donner la paix.

Après qu’ils se furent remis en marche, Andor distingua, à la vive lueur de deux lanternes tumulaires, cette même silhouette de femme qui avait apporté une couronne à la tombe de sa mère, agenouillée devant la grille dorée d’un caveau auprès du mur du cimetière. Il fit un mouvement pour reculer avec le comte dans l’ombre des arbres ; mais il était trop tard. La femme venait de se relever et se dirigeait vers l’allée sablée menant à la porte de sortie ; Riva s’approcha du caveau et lut en grosses lettres d’or : Famille Mardefeld.