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NOUS AVIONS MIS SUR PIED SEIZE BANNIERES

qui rabaissent leurs collerettes et leurs mantilles, tant de jeunes filles qui se cachent la figure derrière leurs éventails ! D’autres bâillent. Les garçons de la confiserie voltigent partout dans la galerie, comme de blanches tourterelles ; au-dessous, des laquais galonnés, aux mains sales, servent des glaces, et chacun jase, critique, rit, tandis que, çà et là, quelque gros conseiller, à gilet de velours à fleurs, regarde l’heure à sa montre.

À la longue, le public cultivé est délivré du supplice classique qu’il s’est infligé.

Bien courte est la souffrance, éternelle la joie.

Le rideau tombe ; on se hâte d’aller prendre du thé à la Restauration française, de la bière à la brasserie, ou de retourner vers sa dame qui, pendant que monsieur était au théâtre, à ouvert sa porte à un jeune lieutenant ; bref, on fait tout ce qu’on peut pour se remettre du plaisir enduré.

Andor a vainement cherché son ami. Dès le quatrième acte, Plant est sorti. Il se trouve maintenant au foyer. Il attend la belle inconnue.

Elle porte un voile épais ; mais il la reconnaît aussitôt à la plume blanche qui flotte sur son petit chapeau noir, à son manteau de velours rouge sombre. Elle n’est pas accompagnée ; il la suit et