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LES PRUSSIENS D’AUJOURD’HUI

— En ceci encore tu te trompes. Se taire à propos de la chose qu’on condamne n’est guère plus honnête que soutenir cette chose. La mission de la presse est sainte, à mes yeux. Pour parler le langage d’Abraham à santa Clara, cette mission se résume ainsi : tremper d’abord sa plume dans sa conscience et puis dans l’encre.

— Très-joli, répliqua Plant ; mais tu es le seul à voir les choses ainsi dans un monde qui ne te comprend pas et qui, loin de t’admirer, se moquera de toi. Ne deviendras-tu donc jamais pratique ? Une occasion magnifique s’offre à toi de conquérir la considération, l’influence, la fortune. Aie confiance en moi à la longue ; laisse-moi te montrer combien sont bonnes mes intentions à ton égard ; suis la route que je t’indiquerai, et à ton nom s’attachera bientôt cet éclat auquel il a droit ; tu me dépasseras très-vite moi-même, assurément, car tu as beaucoup plus appris ; renonce à cette bouderie idéale contre le nouveau monde qui se dresse en face de toi ; secoue les idées fantômes ; suis-moi et tu me donneras raison un jour ; bien plus, tu me seras reconnaissant.

— Sur la voie que tu as parcourue, Plant, je ne suis pas en état de te suivre.

— À quel écrivain empruntes-tu cette phrase ? À Schiller, probablement ?