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LES PRUSSIENS D’AUJOURD’HUI

d’étoffe de cinquante, l’idée ne me serait pas venue qu’il abandonnerait un jour la vanne à café et les caisses de dattes pour les lauriers de l’art. N’en comptez pas moins sur notre sympathie, monsieur Robert Nordstern.

— Que voulez-vous que je fasse de votre sympathie ? répliqua l’acteur haussant ses maigres épaules jusqu’à ses oreilles de satyre triangulaires ; je préférerais vos mains.

— Ah ! très-bien. En ceci je reconnais ta finesse, s’écria Plant. Tu es venu ici pour y chercher des claqueurs ; soit ! À quel endroit de la pièce faudra-t-il t’applaudir ?

— À quel endroit ? fit Gansélès. Voici !

Il se redressa et se mit à déclamer d’une voix aiguë :

C’était plus qu’un combat, Sire, une boucherie.
Deux milliers d’ennemis sur le sol étendus !
Sans compter la horde, dans le fleuve engloutie ;
Et de nos combattants, ni cent ni un perdus.

— Bravo ! Gansélès, bravo ! firent les trois auditeurs en chœur.

— Je vous en prie, pas bravo Gansélès, bravo Nordstern ! modifia le débutant.

Dans la soirée, avant le lever du rideau, Andor et Plant étaient déjà à l’olympe, nom donné au poulailler par les étudiants allemands.