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LES PRUSSIENS D’AUJOURD’HUI

sances dans l’almanach de Gotha et qu’elle était en correspondance avec l’abbé Liszt et la comtesse Hahn-Hahn.

Mais elle passait surtout pour excentrique.

Du temps des perruques à queue, les grandes dames étaient esprits forts ; la philosophie était de mode. Aujourd’hui, aucune d’elles n’a plus de caprices ; les caprices sont mauvais genre ; ce sont les excentricités qui deviennent de bon goût.

Dans les excentricités de la comtesse Bärnburg, il y a un trait marquant : l’universalité. Recevant tout le monde, elle prodigue, à tort ou à raison, la pluie d’or de sa sympathie. Elle brode une chasuble pour le beau dominicain Hasfege, de cette main qui tient le lorgnon pour admirer les Sept Pêchés capitaux de Mackart. Elle ne craint pas de chanter la chansonnette, après Thérèse et Mannsfeld, de quêter pour le pape à la porte des églises, de danser le cancan, et, en temps de guerre, elle soigne les blessés. Selon l’occasion elle est naïve, maligne, bonne, spirituelle, coquette, prodigue, galante, vertueuse, frivole ou pieuse, gaie ou sentimentale ; mais elle ne cesse jamais d’être enthousiaste.

C’est ainsi que le lendemain, dans l’après-midi, elle pénètre, le sourire aux lèvres, l’œil brillant d’enthousiasme, dans la chambre que Wolfgang,