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LES PRUSSIENS D’AUJOURD’HUI

puis elle ajouta en riant : « Comment fait-on le feu ? Moi je ne sais pas. »

Keith rit comme elle, se mit à fendre un morceau de bois et montra à sa femme l’art de préparer un feu qu’il avait appris pendant qu’il était lieutenant. Le café que Julie prépara était très-bon ; mais à midi, lorsque son mari revint d’assez mauvaise humeur, après s’être, pour la première fois de sa vie, occupé sérieusement pendant quatre heures, et qu’elle lui servit d’un air de triomphe le repas préparé pour lui, il s’écria avec colère : « Tu veux que je mange cela ? Ce n’est pas de la soupe, c’est de la lavasse ! Et ces tiges de bottes, tu appelles cela de la viande ! Tout votre talent, à vous les femmes bien élevées, c’est de rester allongées sur une chaise longue à lire des romans, de coqueter dans une loge, de pianoter ; mais, s’il s’agit seulement de préparer un dîner pour l’homme qui travaille pour vous, la chose est au-dessus de votre dignité. »

La pauvre petite femme se mit à pleurer. Le feu lui avait rougi les joues ; elle s’était brûlé les doigts en cuisinant, et tout cela inutilement. Keith avait raison certainement ; elle trouvait elle-même mauvais ce qu’elle avait préparé, et il était resté quatre heures à travailler pour elle !

Quatorze jours encore elle le vit, lui le baron