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UN MARIAGE À LA MODE

pourrais aller faire des écritures chez un avocat, et moi… moi, je cuisinerai, je laverai et je broderai, je coudrai pour un magasin.

— Je ne veux pas, je ne veux pas ! s’écria Keith.

— Sois gentil, mon petit mari ; il vaut mieux être gêné un peu que de descendre de plus en plus.

— Tu crois ? Fais comme tu voudras.

Julie parvint effectivement à faire comme elle voulait. Le baron la laissa commander, prendre en main les rênes du gouvernement. C’eût été certainement un bonheur pour tous deux, si elle avait eu assez de courage pour le dominer complétement dans cette circonstance critique, assez d’énergie pour affirmer sa domination ; malheureusement, elle manquait de ces deux qualités. Par sa patience, sa bonté, son désir de se sacrifier à lui, elle réussissait à l’émouvoir ; mais elle était incapable de lui imposer sa volonté, et la tentative commencée ne fut en somme qu’une tentative, un dernier vacillement de la fierté, de l’honnêteté.

Sous un autre nom que le sien, Keith entra comme clerc chez un notaire, et Julie commença à broder des mouchoirs, à coudre des gants. Elle faisait les lits, la chambre ; elle allait aux provisions avec un panier et cuisinait. Lorsqu’elle voulut préparer le premier déjeuner, elle s’agenouilla devant le poêle, en disant : « Je vais faire du feu »,