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UN MARIAGE À LA MODE

— Ah ! tu n’y comprends rien ; le monde le veut ainsi, répondit Keith piqué dans ses sentiments d’honneur, qu’il avait très-vifs comme on le sait.

Aussitôt que le couple à la mode eut pris possession de son logement, il recommença à vivre avec éclat. Un cercle choisi de lions se réunit autour de la petite baronne, et les dames rivalisèrent de grâce sur les bruns fauteuils bas de son salon. De nouveau on invita, on fut en fête, on prodigua, jusqu’à ce qu’un autre huissier reparut suivi d’autres recors et d’un autre expert. Cette fois, l’homme de loi était un petit homme à larges épaules, à longs pieds, à grosse voix. Il s’efforça d’être grossier, ce qui n’était pas nécessaire, la nature ne s’étant pas, à cet égard, montrée avare envers lui. De ses mains rouges faisant crier comme une brosse la soie du corsage de la baronne, il lui enleva la broche en diamants qu’elle portail. Il soulagea aussi le baron de sa montre. Rien ne lui semblait difficile à faire ; il décrocha le lustre doré du plafond et retira le bouledogue de sa niche.

En cette occurrence, Keith perdit son calme ; il prit sa femme sous le bras et l’emmena. Au rez-de-chaussée, les larmes lui vinrent aux yeux et Julie se jeta à son cou en sanglotant.