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UN MARIAGE À LA MODE

— Ce n’est pas possible, répliqua le baron d’une voix contenue.

— Pourquoi ?

— Parce que Silberburg ne nous appartient pas, parce que je l’ai affermé et que le bail finit dans deux mois.

— Qu’as-tu donc fait de mon argent ? demanda Julie stupéfaite.

— Je n’ai pas eu le courage de t’avouer mes dettes avant notre mariage. Il a fallu les payer, et puis n’avons-nous pas vécu gaiement ?

L’homme au point d’honneur avait tout simplement trompé sa femme.

Elle ne semblait pas comprendre ; elle était peut-être si bien faite à la nouvelle morale de notre temps, qu’elle considérait comme permis le procédé de son mari. Elle se contenta de dire :

— Et l’ameublement ?

— Loué ! répondit le baron avec un noble geste.

— Ainsi, nous ne possédons plus rien ?

— Plus rien.

— Alors, que viennent saisir ces gens-là ?

— Je ne sais pas.

À travers les larmes de Julie brilla un sourire. La pensée qu’elle n’était pas seule trompée, que les créanciers l’étaient aussi, semblait la consoler,