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UN MARIAGE À LA MODE

maison. Il se trouva de bons amis pour prêter, ainsi que des nobles juifs de la ville qui, attendris par le cent pour cent, ouvrirent leur caisse à « M. le baron », et le petit bateau à banderole bariolée sur lequel le beau couple insouciant descendait, avec la gaieté de la jeunesse, le courant de la vie, fut remis à flot pour quelques mois. Mais lorsqu’il échoua de nouveau sur un banc de sable, il fallut porter l’argenterie, les bijoux chez le prêteur et ensuite engager les reconnaissances.

Il y eut d’autres fêtes, d’autres soirées, d’autres bals, d’autres concerts. Le baron Keith se rendit même en voiture à la ville et se montra dans une loge avec sa femme, ce qui apaisa un certain temps ses créanciers. Ces braves gens sont toujours contents pourvu qu’ils voient qu’on jette leur argent par les fenêtres ; mais si leur débiteur veut se servir de ce qu’ils lui ont prêté pour une affaire sérieuse, ils n’ont plus une minute de tranquillité.

Un matin où M. le baron montait un cheval de manége et où madame la baronne essayait une nouvelle robe de chambre de madame Victorine, faite d’après la dernière mode de Paris, entrèrent dans le château deux hommes, dont le manque d’éducation fut aussitôt révélé, parce qu’ils ne