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CE QUE RACONTE UNE MÈRE

les Gladiateurs, le Persée de Cellini, l’Amour et le Thésée de Canova, avec beaucoup d’autres, et les bustes des grands écrivains, des grands penseurs.

Il n’y manquait ni la tête de Jupiter, de Gœthe, ni la méchante figure de vieille femme de Voltaire. Nous nous tenions là pendant les longues soirées d’hiver, et nous lisions, pendant que le vent faisait résonner la harpe éolienne de la Tour du ciel, ou bien nous faisions de la musique nous-mêmes. Je jouais assez bien et ne chantais pas mal.

Aussitôt que mon bon père et moi nous nous trouvions dans la profondeur du bois, je donnais libre cours à ma voix ; je chantais comme un pinson et je m’amusais de voir tout à coup un écureuil apparaître de derrière un arbre et me regarder tout étonné.

D’habitude, quand je me mettais au piano, mon père prenait son violon. Nous jouions de la bonne musique, ou bien je chantais et il m’accompagnait. Son lied favori était l’Errant de Schubert, et le mien, Annette de Tharatt. On avait des goûts si simples, jadis !

Le dimanche, venaient le curé avec son violoncelle et le maître d’école qui faisait le second violon. Nous organisions alors un quatuor.

C’était un beau temps. Ô jeunesse, jeunesse, que tu es belle ! Mais les hommes d’aujourd’hui