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LES PRUSSIENS D’AUJOURD’HUI

non initié ne se serait pas douté le moins du monde que ces deux créatures, l’admirable femme et le laquais tremblant devant elle, formaient un couple amoureux, vingt-quatre heures avant.

— Quelle négligence inexcusable pour le premier jour ! s’écria Valéria les sourcils froncés. Que cela ne se renouvelle plus, Jean !

Plant n’osa rien répondre.

Lorsque l’actrice vint à la ville, son ex-amant prit place sur le siége à côté du cocher, ayant son chien à ses pieds. À la petite porte de derrière du théâtre la voiture s’arrêta. Plant sauta de son siége avec l’empressement d’un laquais bien dressé, ouvrit la portière, aida Valéria à descendre, et la suivit portant la lourde corbeille de la garde-robe.

— Jean, tu peux assister à la représentation du haut de la galerie, lui dit l’actrice après qu’il eut déposé son fardeau.

Jean s’éloigna tout confus. Toutes les petites actrices l’avaient dévisagé si curieusement ! Dans la rue, il respira, fouilla dans ses poches et, au lieu de monter à la galerie, il entra dans une brasserie d’où il pouvait voir l’entrée du théâtre. Il s’assit, acheta une saucisse pour Honte-à-toi, et, tout en buvant un verre de bière après l’autre, en réfléchissant, il la débita par le menu à son compagnon. Jadis, du temps de sa liaison avec Valéria,