Page:Sacher-Masoch - Les Prussiens d’aujourd’hui, 1877.djvu/441

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
31
JEAN

— J’en ai fini, complétement fini avec mon avoir, soupira Plant, si j’étais riche, tu ne parlerais pas ainsi !

— Tu te trompes encore en ceci, toi l’idéaliste pratique, répliqua Valéria avec un de ces fins sourires seyant si bien aux gens rusés, lorsqu’ils ont trompé quelqu’un de moins réfléchi ou d’aveuglé par la passion. Tu me parais avoir complétement oublié que ma dernière année d’engagement ici expire dans quelques semaines. Après, j’entre au théâtre de la Cour et tu sais que là ma liaison avec toi aurait cessé d’être possible. D’autres adorateurs m’attendent. Tu peux donc être sûr que j’aurais rompu avec toi.

— Vraiment ! fit Plant dont la figure grimaçait de fureur. Voilà qui est calmant, en effet. Tu tendras sans doute les filets pour y prendre le roi.

— Ce n’est plus nécessaire, répondit-elle avec un sourire dédaigneux. Il est à mes pieds depuis longtemps. Je n’ai qu’à le relever.

— Alors, je te demanderai seulement pour quel motif tu as planté là le riche fabricant et tu l’as remplacé par moi ?

Plant tremblait de tous ses membres. Il conserva cependant assez d’empire sur lui pour déposer avec soin son cher cigare sur le rebord de la fenêtre.