Page:Sacher-Masoch - Les Prussiens d’aujourd’hui, 1877.djvu/30

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
20
LES PRUSSIENS D’AUJOURD’HUI

agréable, de maintenir nos enfants sains de corps et d’esprit, comme c’est ennuyeux, insipide, endormant ! Parlez-moi plutôt d’une jolie dame qui sait dépenser notre argent avec goût ; celle-ci vaut la peine assurément qu’on se sacrifie pour elle ; ne représente-t-elle pas pour nous les épices, le haut goût du gibier ? Vous me direz peut-être qu’étant avec nous, cette jolie dame fait les yeux doux à dix autres ; tant mieux ; qu’elle nous trompe et se rit de notre jalousie ; tant mieux encore ; qu’enfin elle ne se gêne nullement pour nous fouler de ses petits pieds ; mais c’est tout bonnement impayable, surtout lorsque ses petits pieds sont chaussés de mignonnes pantoufles brodées, et qu’elle sait nous trépigner avec goût. »

Le comte venait de se lever brusquement ; mettant son chapeau sur sa tête, jetant sur la table plusieurs pièces d’argent qui payaient largement sa tasse de café ainsi que le pourboire au garçon, il adressa aux trois jeunes gens un nouveau regard interrogateur. Mais ce coup d’œil ne devait sans doute pas lui suffire, car il se rapprocha d’eux, presque à les toucher, et se prit à les regarder avec compassion en plongeant ses deux mains dans les poches de son pantalon.

— Jeunes gens, vous pensez que je suis fou. Vous croyez que je n’ai pas ma raison, parce que