et toute la philosophie pratique de notre siècle s’épuise vainement à combattre un petit muscle qui s’appelle le cœur. Car c’est un simple muscle qui nous rend si inquiets, qui nous cause tant de joies trompeuses et tant de douleurs absurdes, qui vient se jeter à la traverse de nos calculs les plus sûrs, de nos appréciations les mieux fondées. Nous qui savons tout aujourd’hui, qui avons résolu tous les problèmes sous la voûte du ciel, nous connaissons ce petit muscle dans les moindres détails de sa construction, de ses fonctions, et néanmoins il nous gouverne sans que nous puissions jamais lui faire la loi.
Nous avons banni tous les dieux de la terre ; nous en avons chassé l’amour et la poésie, nous avons prouvé rigoureusement que c’étaient là des choses non pratiques, n’ayant pas de raison d’être ; nous sommes même allés jusqu’à déclarer que ces choses-là n’existaient plus, que c’en était bien fini avec elles ; mais qu’elles se dressent subitement, en travers de notre chemin, renversant nos interminables colonnes de chiffres, et nous croyons voir des fantômes en plein jour. Nous nous souvenons, après, qu’il n’y a pas de fantômes, que l’oxygène, l’azote et le carbone sont des substances trop matérielles pour produire de semblables fantasmagories ; et alors nous nous en