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LES PRUSSIENS D’AUJOURD’HUI

rait se rire de la faveur d’un roi, ce roi ne fût-il qu’un roitelet, quelque chose comme un tyran de Lilliput ou le chef d’une armée de soldats de plomb.

— Vous riez, monsieur le comte, lui dit le sculpteur se tournant brusquement vers lui. Vous semblez ne pas croire qu’un artiste allemand puisse être traité d’une manière… oui, d’une manière aussi gracieuse par un monarque allemand.

— Oh ! du tout, répondit l’interpellé. Je songeais seulement combien c’est heureux pour nous, Allemands, que l’époque werthérienne soit loin derrière nous, ainsi que l’époque… me voilà embarrassé pour définir cette période où quelques têtes à part et peu pratiques s’enthousiasmaient pour la liberté, comme Werther pour l’idéalisme du cœur. Dans notre littérature, nous n’avons pas de type politique de ce genre représentant ce que Werther et Faust sont dans l’autre sens. Mais cela n’empêche nullement d’affirmer qu’il fut un temps où nous avions foi dans la fraternité des peuples, où, en même temps que d’autres peuples asservis, nous rêvions de marcher contre les tyrans. Ce temps n’est plus, et il est bon qu’il ne soit plus.

« La liberté ! Qu’est-ce que la liberté ? Un idéal très-peu pratique, et nous sommes devenus des gens très-pratiques. Notre manière de nous expri-