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LES PRUSSIENS D’AUJOURD’HUI

À eux deux ils gagnaient ainsi beaucoup d’argent dans la semaine. Le samedi soir, ils comptaient gaiement leur avoir ; la main dans la main, assis l’un près de l’autre sur le divan, ils faisaient leurs projets pour le lendemain et allaient se coucher, aussi agités que des enfants qui sont à la veille de leur anniversaire et attendent des cadeaux.

Chaque dimanche Marie semblait une princesse enchantée et Plant le prince qui a trouvé le mot de délivrance. La boutique de madame Peneke se transformait en harem, en boudoir de bayadère, en temple de Vénus. Le monde lui-même semblait éclairé par une tout autre lumière que celle de la semaine, le ciel était plus bleu, les hommes plus joyeux.

Le clerc accourait dès qu’il faisait jour pour prendre le café préparé par la revendeuse et ne laissant rien à désirer comme couleur, goût, parfum. Les gâteaux étaient servis et il prenait place avec Marie, monsieur et madame Peneke. Son costume ce jour-là se composait d’un pantalon collant gris de pigeon, un gilet blanc, un frac bleu à boutons de métal blanc, un pardessus en velours noir et un castor ; le tout neuf, à la dernière mode. Sa bien-aimée le recevait en robe noire de moire antique, garnie de vraies dentelles, joli costume