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— Vous allez certes me comprendre, dit la belle fille ; il y longtemps que mes parents me reprochent de manger leur pain au lieu de me livrer à un riche adorateur. Ils m’ont aujourd’hui menacée de me chasser, si je ne les écoutais pas. Quand à moi, comprenez-moi bien, je suis trop fière pour conclure un pareil marché : j’ai jeté aux pieds de mes parents les diamants que vous m’avez offerts, puis, m’étant ainsi acquittée, j’ai pour toujours quitté leur demeure. Je me suis rendue auprès de vous parce que… — elle s’arrêta, des sanglots étouffaient sa voix — parce que je… vous aime. Je vous appartiens, prenez-moi quand vous voudrez, si vous m’aimez encore !…

— Grand Dieu ! s’écria Steinfeld, vous me rendez aujourd’hui le plus heureux des mortels.

Il se leva et enserra de ses bras la belle et superbe fille en un transport de tendresse.

Elle resta muette et incapable d’exprimer la moindre volonté. Il la transporta sur un canapé, lui enleva son chapeau qu’il jeta dans le premier coin venu, il dénoua sa superbe chevelure, puis, embrasé de désirs passionnés, lui arracha la fourrure qui couvrait son admirable gorge…

Elle fut à lui !

Le jour même, il lui choisit, dans la Ringstrasse, une demeure meublée avec le luxe le