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la fumée du tabac qui, s’élevant en l’air, y formait maintes spirales et figures bizarres, et, cependant songeait à sa platonique odalisque, la belle Anna.

Soudain, il perçut comme le frou-frou d’un vêtement de femme, et, tournant vivement la tête, il vit Anna Klauer en personne devant lui. C’était la première fois qu’elle franchissait le seuil de sa demeure. Quelque chose d’extraordinaire devait être arrivé, d’autant plus que, pour la circonstance, elle avait pris la peine de s’envelopper d’un voile épais. Comme elle découvrait son visage, le baron la contempla avec surprise ; en grande dame consommée, elle le considéra de la même façon. Autour de sa taille mince et élancée tombaient les longs plis éclatants d’une robe de velours noir, une jaquette entr’ouverte de même étoffe bordée de coûteuse zibeline laissait deviner ses superbes formes de jeune fille. Un chapeau de velours noir garni d’une longue plume blanche complétait sa toilette. À sa main finement gantée, elle portait un manchon également de zibeline.

Alors qu’elle allait et venait d’un pas rapide par la pièce, elle laissait voir de temps à autre son admirable petit pied, chaussé de bottines de velours noir rehaussé d’étroites bandes de fourrure de zibeline.